Le pouvoir, une responsabilité à partager et à assumer ?

Conférence donnée par Julie Battilana le 10 octobre 2024 à l’Ecole des Mines

Lors d’une conférence donnée à l’École des Mines de Paris, Julie Battilana, professeur d’innovation sociale à l’université Harvard, a présenté les grandes lignes de son ouvrage « Le Pouvoir, pour Tous ! », co-écrit avec Tiziana Casciaro.

En s’appuyant sur la recherche académique, les autrices montrent que le pouvoir n’est pas une affaire de caractéristiques individuelles intrinsèques et n’est pas réservé à ceux et celles qui viennent de groupes sociaux privilégiés (qui détiennent donc déjà du pouvoir). À rebours d’une vision du pouvoir comme lointain, mystérieux et inatteignable, elles montrent que toute personne a la possibilité d’influencer le cours des choses.

Julie Battilana a donc principalement insisté lors de son intervention sur le “mode d’emploi” du pouvoir. Pour elle, conquérir du pouvoir dans un secteur donné — c’est-à-dire de la capacité d’influence — passe par une cartographie des acteurs qui détiennent l’accès aux ressources et les objectifs de ces derniers. À partir de ce travail de repérage, les leviers d’action sont identifiés, et il devient possible de redistribuer le pouvoir au sein de ce secteur. Le livre de Julie Battilana et Tiziana Casciaro est donc une invitation à l’action, mais aussi un manuel pour se saisir des opportunités de changement.

Néanmoins, cela ne veut pas dire qu’elles négligent la dimension collective du pouvoir. Les garde-fous institutionnels sont essentiels pour que ceux et celles qui exercent le pouvoir ne deviennent pas autocratiques et conservent l’empathie nécessaire à un usage bénéfique du pouvoir. 

Ainsi, Julie Battilana a insisté sur la responsabilité éthique liée à l’exercice du pouvoir. Le pouvoir n’est ni bon ni mauvais en soi, mais il devient un outil de transformation sociale lorsqu’il est exercé de manière éthique, avec la capacité de résoudre les inégalités et de favoriser la justice sociale. En comprenant et en maîtrisant les dynamiques du pouvoir, chacun peut devenir acteur du changement. Il est donc impératif de prendre conscience de ses propres sources de pouvoir et de les utiliser pour influencer positivement son environnement.

Ces questions complexes de répartition et de limitation du pouvoir ont animé les échanges avec la salle. Notre oratrice a souligné l’exemple des organisations hybrides, qui peuvent apporter des réponses en combinant efficacité et inclusion dans l’exercice du pouvoir.

L’ampleur des enjeux auxquels nous faisons face, comme les crises démocratiques et écologiques rappelées en début d’intervention, exige que nous nous impliquions tous dans la prise du pouvoir ! Le pouvoir n’est pas seulement un privilège à obtenir, mais une responsabilité à partager et à assumer.